Chambre de Lola

Lola allait à la boulangerie chercher une baguette de pain quand un éclair la frappa. Elle crut que sa dernière heure était arrivée et elle ferma les yeux, terrifiée par une mort imminente. Se sentant toujours bien vivante, elle avait fini par les rouvrir et se retrouver dans cette pièce. Elle avait battu des cils plusieurs fois, persuadée que ce qu'elle voyait n'était qu'hallucination. Mais la vision ne s'estompa pas : Lola était bel et bien autre part que dans la rue où elle se trouvait quelques instants plus tôt.
Autre fait étrange, la vision d'elle avec un garçon dont elle n'avait pas le souvenir lui vint en tête. Elle fronça les soucils, puis tout lui revint. Tom, qui avait disparu de sa vie quelques mois plus tôt et dont elle ne conservait aucun souvenir, venait de réapparaître dans son passé dont il avait étrangement été gommé depuis sa disparition. Elle se demanda comment elle avait bien pu l'oublier mais ne s'attarda pas sur la question, tant le phénomène qui venait de se produire était bizarre. Elle venait de se voir dans un miroir. Rien de bien extraordinaire, si ce n'est qu'elle avait des ailes ! Eberluée, elle les agita pour se convaincre qu'elles étaient réellement là. Cette fois, c'en était trop, Lola se pinça pour s'assurer qu'elle ne rêvait pas. La douleur lui apprit que tout était bien réel et un sourire éclaira son visage. Elle qui avait toujours rêver de voler, elle était servie !
Elle jeta ensuite un coup d'oeil circulaire à ce qui l'entourait. Du parquet ciré, une tapisserie blanc cassé, un lit double sous une fenêtre qui laissait entrer un flot de lumière. L'armoire était pleine de ses vêtements, et tous les tiroirs de sa table de chevet et de sa commode contenaient ses effets personnels.
Ravie, Lola décida de sortir et de partir en exploration dans ce drôle de lieu. En refermant la porte sur ses talons, la plaque qui l'ornait brilla et son prénom s'inscrivit dessus, comme écrit par un stylo invisible. Lola caressa la plaque du bout des doigts tandis qu'un sourire éclairait son visage. Peut-être avait-elle enfin trouvé un chez elle ...

Lola avait entendu une exclamation dans la fond du couloir mais, pensant que la personne à qui appartenait la voix qui venait de retentir regardait où elle marchait, elle n'y avait pas prêté une grande attention, tant elle était ravie par le prénom qui ornait sa porte. Aussi, quelle ne fut pas sa surprise quand elle se sentit se faire bousculer assez brutalement. Elle sursauta et jeta un coup d'oeil au jeune homme. Grand, brun et belle gueule, il avait tout pour plaire nota-t-elle. Et son air désolé ne permettait pas de penser qu'il lui était rentrer dedans volontairement. De toute façon, il auait pu avoir l'air agressif au possible que Lola en aurait tout de même déduit qu'il ne l'avait pas fait exprès. Elle était comme ça Lola, un peu trop naïve ...
Quand il lui parla elle lui fit un de ses sourires adorables qui montrent immédiatement le genre de personne gentille qu'elle est.

-C'est pas grave, s'empressa-t-elle de dire. Moi c'est Lola, et toi ?

Elle avait l'habitude d'être plutôt réservée, bien que de manière non excessive, et d'ordinaire, elle n'aurait jamais osé adressé la parole à un garçon aussi beau. Seulement dans cet endroit, avec ses ailes, et avec son nom gravé sur cette porte, elle se sentait tellement bien qu'elle ne pensa pas une seconde au fait qu'il devait ne parler qu'à des filles magnifiques vu sa beauté à lui. En fait, sa façon positive de voir le monde l'était encore plus, dans cet étrange endroit qu'elle trouvait déjà génial. Et puis avec un peu de chance, il pourrait lui apprendre où elle était.

Lola eut un sourire ravi. Décidément, ce garçon était gentil. Ben quoi ? Il était ravi de la rencontrer, ça voulait dire qu'il était sympa non ? Et puis quelqu'un qui a un sourire aussi somptueux, on peut difficilement penser qu'il dit autre chose que ce qu'il pense, et on peut difficilement lui résister aussi. Mais n'oubliant tout de même pas qu'elle se trouvait dans un endroit absolument inconnu de manière absolument incompréhensible, Lola décida qu'il serait judicieux de se renseigner.

-Dit tu sais où on est exactement ? J'allais à la boulangerie quand je me suis retrouvée ici avec ces ailes dans le dos.

Comme pour appuyer ses propos, Lola agita ses ailes avec un air content, en les regardant bonger avec émerveillement. Non vraiment, elle adorait ses ailes.

Un sourire ravi éclaira le visage de Lola. Cette phrase, c'était une citation d'un des bouquins les plus merveilleux qu'elle n'ait jamais lu. Elle se souvenait encore de tous les sentiments qu'avaient fait naître ces quelques lignes, et cet émerveillement dans lequel elles l'avaient plongé. Si Enrique connaissait ce bouquin, il avait dû l'adorer. Et quand un garçon adore un bouquin pareil, c'est qu'il est doté d'une sensibilité impresionnante pour un homme.

-Tu connais ce livre ? Je l'ai adoré pas toi ?

La deuxième partie de sa phrase la laissait perplexe. Des pouvoirs, des ailes ... Ca ressemblait à un livre de sciences fiction. Ca lui plaisait bien sûr, mais elle se sentait un peu déboussolée dans un univers aussi inconnu.

-Peut-être qu'il n'y a rien à comprendre, dit-elle pensivement.

Lola eut une moue approbatrice. Ce garçon était le premier à lui dire qu'il avait apprécié ce livre. Son cousin avait décrété que c'était un navet, son père avait à peine lu les deux premiers chapitres, et Tom avait marmonné que c'était un livre pour nanas. Il n'y avait que son copain qui l'avait apprécié, mais sa meilleure amie lui avait assuré qu'il n'avait dit ça que pour lui faire plaisir. Lola avait tenté de protester, persuadée qu'il lui disait la vérité, mais elle avait dû se rendre à l'évidence quand il avait été incapable de citer un seul passage du livre. Enrique avait donc bon goût.

-Moi aussi ! S'excama-t-elle avec un grand sourire. C'était tellement émouvant aussi ... Ajouta-t-elle les yeux dans le vague.

Quand il lui annonça que l'endroit recelait de choses à faire, Lola lui prêta une oreille attentive. Et quand il lui dit qu'il était près à la faire visiter, elle se dit qu'il était vraiment gentil. Tant pis s'il ne pouvait pas lui expliquer ce qu'elle faisait là : elle en était très heureuse et ne comptait de toute façon pas se poser de questions.

-Je veux bien, acquiesça-t-elle. Tu pourrais me montrer ton endroit préféré ?

La question destabilisa un peu Lola. Son maillot de bain ? Oui elle l'avait, mais elle s'était déjà retrouvé une fois dans une pièce VIDE avec UN mec pour toute compagnie, et surtout en maillot de bain. Elle ne se sentait d'ailleurs pas très désireuse de renouveler l'expérience. Non pas qu'Enrique ne lui inspirait pas confiance, mais elle savait pertinemment qu'elle se sentirait affreusement gênée. Elle répondit donc prudemment :

-Euh oui je crois ... Mais tu m'amènes où exactement ?

Elle se sentait un peu male à l'aise de se montrer si réticente, mais elle savait qu'elle le serait encore plus si elle était en maillot de bain. Et puis Enrique n'avait pas l'air d'un garçon à se vexer ... Et de toute façon, s'il y avait tant de chose à faire, il y aurait sûrement d'autres endroits qu'Enrique appréciait. Et il se pouvait aussi qu'elle n'ait jamais vu l'endroit dont il lui parlait, auquel cas elle devrait se plier à sa demande, faute d'arguments à avancer.

Aux remarques d'Enrique, Lola piqua deux fars monumentaux. Elle n'appréciait vraiment pas les compliments, dans la mesure où ils la mettaient toujours male à l'aise. Mais alors là, c'était le seumum du comble du malaise ! Sincèrement, un mec aussi beau qui vous dit ça et surtout de cette façon là, avec cette voix grave, suave et surtout HYPER sensuelle, il y a de quoi donner envie à Lola de rentrer dans un trou de souris pour cacher sa tête couleur coquelicot. Malheureusement et, elle ne se le dirait jamais assez d'après elle, elle pouvait toujours rêver pour espérer passer ne serait-ce que l'orteil dans ce genre de trou. Il fallait donc qu'elle fasse face et qu'elle trouve quelque chose à dire, quoi que ce soit. Juste histoire de combler le silence pesant qui s'était installé. Elle bégaya donc :

-Non c'est pas ça ... C'est ... En fait ... Je sais pas j'ai déjà vu deux pièces où il fallait un maillot, ça se trouve c'est le même endroit ... Et puis j'aimerais bien voir autre chose. Enfin si tu veux on peut y aller ... Capitual-t-elle finalement, ne sachant plus où se mettre.

-J'ai trouvé l'atmosphère un peu étouffante, affirma Lola.

Néanmoins, elle le suivit, bon gré mal gré. Elle trainait un peu, sans s'en rendre vraiment compte, c'était son inconscient qui prenait le dessus. Pour se donner contenance, elle dit :

-Si il était gentil moi j'ai trouvé. Un certain Matthieu, tu connais ?

Lola sourit à la question d'Enrique. Son élément ne la surprenait pas, elle avait toujours aimé le grand air en fait.

-Je suis air, répondit-elle. Et toi ?

Tout en marchant, Lola regardait ce qui l'entourait, totalement captivée. Les murs étaient blancs cassés, et tout le long du couloir, des portes les ornaient des deux côtés. Enrique, Matthieu, Hessadhée, Lou, Gabriel, que des noms qui ne lui étaient pas inconnus. Néanmoins, il y en eut un qui la marqua. Pire que ça, il la frappa complètement. Elle le connaissait ce nom, pour l'avoir pronnoncé si souvent, pour l'avoir oublié un moment, pour s'en être souvenu dernièrement. Tom. Le frère de sa meilleure amie, un peu le sien aussi. Se pouvait-il qu'il s'agisse de lui ? De celui qui la protégeait sans cesse sans jamais être étouffant ? Et qui lui avait évité tant de bévues qu'elle aurait regretté ? Ni tenant plus, elle questionna Enrique.

-Diit ... Tu connais ce Tom ?

-Ben il est gentil, affirma Lola.

Anxieuse, elle attendit ensuite la réponse à sa question. Se pouvait-il qu'il connaisse Tom ? Il se pouvait qu'il ne s'agisse absolument pas du même, mais elle ne pouvait s'empêcher d'espérer. Peut-être que le fait qu'il soit ici expliquerait sa soudaine disparition de sa vie et de ses souvenirs ? Fort heureusement, ces derniers lui étaient revenus dès qu'elle s'était retrouvée dans sa chambre ici.
Quand il lui avoua le connaître, Lola eut un sourire et demanda :

-C'est vrai ? Il était comment ? Ca se trouve c'est celui que je connais.

Elle disait ça sur un ton distrait et en essayant de paraître détachée, mais elle ne pouvait s'empêcher d'attendre la réponse avec impatience. L'idée de retrouver celui qui était son frère de coeur l'enthousiasmait au plus haut point. Cela n'avait pas l'air d'emballer vraiment Enrique, mais Lola était trop naïve et persuadée que tout le monde appréciait tout le monde, comme elle le faisait, pour s'en apercevoir. Tout à ses joyeuses pensées, elle remarqua à peine le sourire du jeune homme mais le lui rendit bien vite.

Lola vit Enrique pousser un soupir qui en disait long sur son état d'esprit : elle devait l'ennuyer. Bon c'est vrai qu'elle n'était peut-être pas très aimable, après tout elle lui parlait d'un autre mec alors qu'elle venait de le rencontrer. Seulement voilà, elle ne pouvait pas s'empêcher. C'était tout de même une chance incroyable qu'elle tenait là, la chance de retrouver un frère de coeur et un protecteur qu'elle croyait disparu. Et elle devait bien s'avouer qu'il lui manquait beaucoup. Il suffisait de voir comment sa gentillesse l'avait bouffée dès qu'il était parti ... Enfin, peut-être que si elle exmpliquait un peu à Enrique les raisons qu'elle avait de l'apprécier, il serait plus gentil et consentirait à le décrire un peu ? Parce que ce n'était pas avec la description qu'il lui avait donné qu'elle risquait de le reconnaître ...

-Oui mais des comme lui sur Terre il n'y en a qu'un exemplaire, avança Lola. Tu sais c'était un peu comme un frère pour moi ... Il m'a évité bien des galères et je croyais qu'il avait disparu de ma vie jusqu'à atterrir ici. Alors forcément j'ai envie de le revoir, tu comprends ? Et si c'était lui ça me ferait plaisir. Alors tu voudrais pas me le décrire un peu s'il te plaît ?

Elle avait accompagné sa demande d'une moue enfantine, sans réellement s'en rendre compte car elle n'était pas manipulatrice pour un sou.